Ôte-toi de mon soleil
Auteur : Diogène , en 335 av. J.-C.
Explication
En 335 av. J.-C., les Grecs assemblés dans l’isthme de Corinthe désignent le roi de Macédoine, Alexandre III, comme chef de l’expédition militaire contre les Perses. À vingt ans, le jeune homme vient de succéder à son père Philippe II sur le trône d’un royaume en pleine expansion.
Celui qu’on appellera bientôt Alexandre le Grand apprécie la compagnie des philosophes. N’a-t-il pas eu Aristote comme précepteur ? Il souhaite donc tout naturellement rencontrer Diogène le Cynique, célèbre pour son mode de vie dépouillé (il vit dans un tonneau aux abords de Corinthe, sans écuelle ni gobelet) et son refus des conventions (il fait ses besoins en public).
Plusieurs historiens de l’Antiquité, comme Plutarque et Diogène Laërce, ont décrit cette scène : allongé au soleil, à proximité du gymnase où il dispense son enseignement, cet homme de près de 80 ans relève la tête à l’approche de la foule. Après l’avoir salué le premier, Alexandre lui demande s’il a besoin de quelque chose. « Oui, répond tranquillement Diogène. Ôte-toi un peu de mon soleil. » Sur le chemin du retour, les moqueries des courtisans finissent par indisposer le roi de Macédoine.
« Eh bien moi, leur dit-il enfin, si je n’étais pas Alexandre, je voudrais être Diogène. »
Peu après, la prophétesse de Delphes annonça à Alexandre qu’il était o invincible. Sans doute le Conquérant se souvint-il quelques années plus tard, en descendant le fleuve Indus, que sa toute-puissance sur les hommes ne pouvait rien contre la liberté d’un seul vieillard, Diogène, dont le nom signifie littéralement « né de dieu ».