La justice et le droit : L'homme porte en lui-même la justification principale de la propriété
La possession de biens – patrimoine, argent, objets divers – est souvent l’effet d’un héritage ou le produit d’une acquisition. Inégalement répartie, introduisant des différences de richesse, la propriété semble donc être un phénomène social que l’on peut contester au nom de l’égalité naturelle entre les hommes. Pourtant, selon Locke, ces inégalités ne sont en rien injustes car la propriété est un droit naturel. Comment justifie-t-il cette thèse ?
Pour le fondateur du libéralisme, la propriété a sa source originaire dans la liberté naturelle propre à chacun. Être libre en effet, c’est d’abord n’être l’esclave de personne, autrement dit être propriétaire de soi, de son corps et de son existence. Mais cette propriété s’étend également à tout ce que l’individu transforme par son travail. Son œuvre, matérielle ou intellectuelle, lui appartient nécessairement, car elle n’est rien d’autre que le prolongement de son action sur les choses.
En d’autres termes, ce qui est à l’origine commun à tous, la nature et ses ressources, devient privé sitôt qu’un homme y a inséré son labeur et l’a fait sien : son activité est en ce sens la justification de sa propriété. Par exemple, un terrain en friche une fois labouré appartient, de même que sa récolte, au paysan qui s’y est consacré. On comprend pourquoi, aux yeux de Locke, considérer la propriété comme un droit naturel ne revient pas à perpétuer les inégalités sociales, mais plutôt à faire de l’individu et de son investissement personnel la seule source de sa richesse.