La liberté : L'éducation philosophique consiste à apprendre à vouloir chaque chose comme elle arrive
Le fatalisme implicite de la formule est inacceptable pour nos esprits modernes enclins à croire que la volonté ne s’incarne jamais mieux que dans l’opposition au destin. À l’inverse, affirme le stoïcien Épictète, l’ excellence de la volonté n’est atteinte qu’une fois que l’homme consent au monde tel qu’il est. Mais comment prétendre être libre si l’on doit tout accepter ?
Tout d’abord, rappelle le philosophe, il est vain de s’opposer au cours des événements. La raison nous avise en effet que certains faits sont inévitables, et cette compréhension nous dispense de souffrir des échecs de nos téméraires entreprises. De ce discernement naîtra non le désespoir, mais la liberté intérieure de celui qui a su agir sur ses craintes et désirs. Ainsi l’homme ruiné ne regrettera pas sa fortune, pas plus que la belle femme ne se lamentera de voir s’évanouir sa jeunesse. Plus encore, une éducation digne de ce nom enseigne à s’approprier ce qui semble étranger. Car tant que le destin s’impose à nos désirs comme un phénomène extérieur, nous ne pouvons que le subir. Mais si nous parvenons à diriger notre volonté dans le sens des événements, tout se passera comme si nous les avions choisis, et nous les accompagnerons plus que nous ne nous y soumettrons.
L’enjeu est de taille. Si le philosophe parvient à forger chez ses disciples cette adhésion fondamentale au destin, il fera d’eux des êtres invulnérables aux coups du sort et capables d’atteindre l’« ataraxie », cette quiétude bienheureuse d’une âme devenue impassible.