L'art : Le beau est ce qui plaît universellement sans concept

Affirmer qu’une chose est belle, indique Kant, ne peut être un jugement logique ou objectif, à l’instar des jugements scientifiques. L’expérience esthétique repose en effet, au moins en partie, sur notre sensibilité. Elle ne se tire d’aucun critère rigoureux ou concept. On ne peut donc pas démontrer qu’une œuvre d’art est belle ! Mais il ne convient pas non plus de réduire le beau à une appréciation exclusivement individuelle, subjective, comme le serait un jugement sensible (par exemple : « Je déteste tel aliment »). D’ailleurs, si j’ai trouvé une œuvre magnifique tandis que mon amie soutient qu’elle est horrible, je vais inévitablement défendre mon jugement et argumenter pour la persuader du contraire. Comme si la beauté était une caractéristique objective de l’œuvre.
C’est là toute l’ambiguïté du « beau ». Il est, écrit Kant, une faveur faite à l’âme, qui se délecte de la contemplation d’un objet, et ce plaisir est théoriquement communicable à tous. Car bien que nous ne nous accordions pas, en général, sur la beauté ou la laideur des choses, nous prétendons tous que notre jugement dépasse notre individualité, en lui supposant ainsi une certaine universalité. Finalement, faute de concept, nous nous retrouvons sans savoir pourquoi égaux devant la beauté, comme nous le sommes devant la mort.