Le temps et l'histoire : Ceux qui ne peuvent se rappeler le passé sont condamnés à le répéter: ceux qui ne peuvent se rappeler le passé sont condamnés à le répéter
L’aphorisme du philosophe hispano-américain George Santayana est devenu une sorte de mot d’ordre pour le « devoir de mémoire ». Nous qui héritons des grandes tragédies du XXe siècle en mesurons la terrible portée. Pourtant,Santayana le formula dès 1905.
À cette époque, Freud s’intéresse au refoulement et à ses conséquences, montrant que l’esprit se libère de certains troubles grâce au travail de la remémoration. Santayana, quant à lui, songe autant aux peuples qu’aux individus. Leur existence et leur progrès dépendent de leur capacité à s’instruire de leur passé. Les sociétés premières, dites traditionnelles, nous semblent statiques, pétrifiées dans un âge immémorial qu’elles perpétuent. N’est-ce pas justement parce qu’elles ne disposent pas d’historiens ? La mémoire collective, pressent Santayana, loin d’être un vague reflet d’événements évanouis, est en réalité un acte qui influence le présent et permet de construire l’avenir.
Toutefois, le culte de la mémoire, lorsqu’il fournit une occasion de multiplier les commémorations qui nous arrangent, peut à son tour pervertir notre compréhension du présent en cultivant certains ressentiments. La mise en garde du philosophe offre donc un espoir limité contre le fatalisme : nul ne peut assurer que ceux qui se souviennent seront protégés contre la répétition de certaines tragédies…