Mao Zedong
Introduction:
Mao Zedong (ou Mao Tsétoung, 1893-1976) fut l’un des cofondateurs du Parti communiste chinois en 1921. Il le mènera au pouvoir, non sans heurts : défaiteface aux nationalistes de Tchang Kaï-chek et « Longue Marche » en 1934- 1935 ; lutte épuisante et sanglante contre les Japonais, avant la victoire et l’accession au pouvoir en 1949. Le « Grand Timonier» restera, à des titres divers, au pouvoir effectif de 1949 quasiment jusqu’à sa mort en 1976.
Ayant adapté la doctrine marxiste-léniniste à une société largement paysanne, Mao impose à la Chine une économie collectiviste sous la dictature du parti unique. Il s’inspire d’abord de la révolution soviétique puis, après une rupture lorsque Khrouchtchev arrive au pouvoir et que la référence à Staline est moins louangeuse en URSS, avec des méthodes plus personnelles. Ce sera le « Grand Bond en avant » (1958-1960), qui aboutit à une famine extrêmement meurtrière. Menacé politiquement, il impose ensuite, pour reprendre le pouvoir, la «Révolution culturelle» (1966- 1969), au cours de laquelle les Gardes rouges traquent — et éliminent — les relents contre-révolutionnaires au sein même des anciens cadres du Parti. Comme pour Staline, le culte de la personnalité peut alors s’exprimer pleinement jusqu’à la mort de Mao.
Pour autant, dans les années 1970, Mao entame une politique d’intégration de la Chine dans le concert des nations, s’ouvrant à la diplomatie occidentale (la Chine communiste entre à l’ONU en 1971), et permettant de libéraliser un peu l’économie.
Il reste que le bilan de ce que l’on présente parfois comme la difficile mais remarquable accession de la Chine au monde moderne est accablant : régressions économiques avec les famines qui s’ensuivent, désastres écologiques, invasion du Tibet, mise au pas des minorités ethniques chinoises – on évalue à plusieurs dizaines de millions de morts les conséquences des politiques du Grand Timonier.
Dans ce discours de 1957, dont nous ne donnons qu’une partie, Mao ne cache d’ailleurs pas les limites du débat qui peut s’instaurer en Chine au sujet des thèses présentées par le Parti !
Discours de Mao Zedong:
DE LA JUSTE SOLUTION DES CONTRADICTIONS:
Pour apprécier à leur juste valeur les résultats de notre travail d’élimination des contre-révolutionnaires, examinons les répercussions des événements de Hongrie dans notre pays. Ces événements ont provoqué un certain remous parmi une partie de nos intellectuels, sans pourtant entraîner de troubles. Comment expliquer cela ? L’une des raisons en est, il faut le dire, que nous avons réussi à liquider la contre-révolution de façon fort radicale.
Certes, la solidité de notre État n’est pas due en premier lieu à l’élimination des contre-révolutionnaires. Elle est due avant tout à ceci : nous avons un Parti communiste et une Armée de Libération aguerris par une lutte révolutionnaire de plusieurs dizaines d’années, et un
peuple travailleur également aguerri par cette lutte. Notre Parti et notre Armée se sont profondément enracinés dans les masses ; ils se sont forgés au feu d’une longue lutte révolutionnaire ; ils sont aptes au combat. Notre république populaire n’a pas été créée du jour au lendemain, elle s’est développée progressivement à partir des bases révolutionnaires. La lutte a aussi trempé à des degrés divers un certain nombre de personnalités démocratiques, qui ont traversé la période d’épreuves avec nous. La lutte contre l’impérialisme et la réaction a trempé un certain nombre de nos intellectuels, et beaucoup d’entre eux, après la Libération, sont passés par l’école de la rééducation idéologique, destinée à leur apprendre à faire une distinction nette entre nous et nos ennemis. En outre, la solidité de notre État est due aussi à nos mesures économiques foncièrement justes, à la stabilité et à l’amélioration progressive des conditions de vie du peuple, à la justesse de notre politique à l’égard de la bourgeoisie nationale et des autres classes, ainsi qu’à d’autres raisons encore. Cependant, nos succès dans la liquidation de la contre-révolution sont incontestablement une des causes importantes de la consolidation de notre État.
Après la Libération, nous avons éliminé un certain nombre de contre-révolutionnaires. Certains d’entre eux, qui avaient commis de grands crimes, furent condamnés à mort. C’était tout à fait indispensable, le peuple l’exigeait et on l’a fait pour le libérer de l’oppression que faisaient peser sur lui depuis de longues années les éléments contre- révolutionnaires et toutes sortes de tyrans locaux, autrement dit, pour libérer les forces productives. Si nous n’avions pas agi ainsi, les masses populaires n’auraient pu relever la tête. À partir de 1956, toutefois, la situation a radicalement changé. À considérer l’ensemble du pays, la plupart des contre-révolutionnaires ont été éliminés. Notre tâche fondamentale n’est plus de libérer les forces productives, mais de les protéger et de les développer dans le cadre des nouveaux rapports de production. Ne comprenant pas que notre politique actuelle correspond à la situation actuelle et que la politique appliquée dans le passé correspondait à la situation du passé, certains veulent se servir de notre politique actuelle pour remettre en question les décisions antérieures et cherchent à nier nos immenses succès dans l’élimination des contre- révolutionnaires. Cela est complètement erroné, et les masses populaires ne le toléreront pas.
Notre travail d’élimination des contre-révolutionnaires est marqué essentiellement par des succès, mais des erreurs ont aussi été commises. Dans certains cas, il y a eu des excès, et dans d’autres, des contre-révolutionnaires ont échappé au châtiment. Notre politique en cette matière est la suivante : « S’il y a des contre- révolutionnaires, il faut les éliminer ; s’il y a des erreurs, il faut les corriger. » Notre ligne de conduite dans le travail d’élimination des contre-révolutionnaires, c’est la liquidation de la contre-révolution par les masses. […] Les masses acquièrent leur expérience dans la lutte. Si elles agissent correctement, elles acquièrent l’expérience des actions correctes ; si elles commettent des erreurs, elles tirent la leçon des erreurs commises.
[…] Je propose qu’on procède cette année ou l’année prochaine à une vérification générale du travail d’élimination des contre-révolutionnaires, afin de dresser le bilan de l’expérience acquise, d’encourager l’esprit de justice et de combattre les tendances malsaines. […] Durant cette vérification, nous devons aider les nombreux cadres et éléments actifs ayant pris part au travail d’élimination,
et non refroidir leur zèle. Il serait faux de les décourager.
Il n’en demeure pas moins que les erreurs, une fois découvertes, doivent être corrigées. Telle doit être l’attitude de tous les services de sécurité publique, parquets, départements judiciaires, prisons et établissements de rééducation par le travail.
Actuellement, en ce qui concerne les contre- révolutionnaires, la situation peut se résumer en ces mots : des contre-révolutionnaires existent encore, mais en petit nombre. Ce qu’il faut voir d’abord, c’est qu’il en existe encore. Certains disent qu’il n’y en a plus, que le calme règne partout, qu’on peut dormir sur les deux oreilles. Cela ne correspond pas à la réalité. En fait, il existe encore des contre-révolutionnaires (naturellement pas partout ni dans chaque organisation) et il est encore nécessaire de poursuivre la lutte contre eux. Il faut comprendre que les contre-révolutionnaires cachés, donc non éliminés, ne renonceront pas à leurs desseins, qu’ils chercheront toutes les occasions pour créer des troubles, que les impérialistes américains et la clique de Tchang Kaïchek ne cesseront d’envoyer chez nous leurs agents se livrer à des activités de sabotage. Même après l’élimination de tous les contre-révolutionnaires existants, il peut encore en surgir de nouveaux. Si nous laissons dormir notre vigilance, nous tomberons dans de graves erreurs qui nous coûteront cher. Partout où les contre- révolutionnaires font leur sale besogne, il faut les éliminer énergiquement. Mais, bien entendu, si nous considérons l’ensemble du pays, il n’y a plus beaucoup de contre-révolutionnaires. Il serait faux de dire qu’ils sont encore très nombreux en Chine. Admettre une telle appréciation, ce serait également créer de la confusion.
Les contradictions au sein de notre peuple se manifestent aussi parmi les intellectuels. Plusieurs millions d’intellectuels, qui servaient autrefois l’ancienne société, sont maintenant passés au service de la société nouvelle. La question qui se pose est celle-ci : de quelle façon peuvent-ils s’adapter aux besoins de la société nouvelle et comment les aiderons-nous à y parvenir ? C’est là également une des contradictions au sein du peuple.
Au cours des sept dernières années, la plupart de nos intellectuels ont fait des progrès notables. Ils se prononcent pour le régime socialiste. Nombre d’entre eux s’appliquent à bien étudier le marxisme, et certains sont devenus des communistes. Le nombre de ces derniers, quoique encore peu élevé, ne cesse d’augmenter. Évidemment, il y a encore des intellectuels qui continuent à douter du socialisme ou qui ne l’approuvent pas, mais ce n’est qu’une minorité.
La Chine a besoin que le plus grand nombre possible d’intellectuels se mettent au service de l’œuvre gigantesque et ardue de son édification socialiste. Nous devons faire confiance à tous les intellectuels qui sont vraiment désireux de servir la cause du socialisme, améliorer radicalement nos rapports avec eux et les aider à résoudre tous les problèmes qui réclament une solution, afin de leur donner la possibilité de faire valoir pleinement leurs talents. Nombre de nos camarades ne savent pas rallier à eux les intellectuels, ils se montrent rigides à leur égard, ils ne respectent pas leur travail et, dans le domaine scientifique et culturel, ils se permettent une ingérence déplacée dans les affaires dont ils n’ont pas à se mêler. Nous devons en finir avec tous ces défauts.
Bien que la masse de nos intellectuels ait déjà fait des progrès, elle ne doit pas pour autant s’abandonner à la suffisance. Pour être pleinement au niveau des exigences de la société nouvelle et faire corps avec les ouvriers et les paysans, les intellectuels doivent poursuivre leur rééducation, se débarrasser progressivement de leur conception bourgeoise du monde et adopter la conception prolétarienne, communiste, du monde. Le changement de conception du monde est un changement radical, et on ne peut pas dire que la plupart de nos intellectuels l’ont déjà accompli. Nous espérons que nos intellectuels continueront d’avancer et que, progressivement, dans le cours de leur travail et de leur étude, ils acquerront une conception communiste du monde, s’assimileront le marxisme-léninisme et se fondront en un tout avec les ouvriers et les paysans. Nous espérons qu’ils ne s’arrêteront pas à mi-chemin et qu’à plus forte raison ils ne feront pas marche arrière, car cela les conduirait à une impasse. Les changements intervenus dans notre régime social et la suppression, pour l’essentiel, de la base économique de l’idéologie bourgeoise font qu’il existe pour la masse de nos intellectuels non seulement la nécessité mais aussi la possibilité de modifier leur conception du monde. Toutefois, un changement complet de la conception du monde exige un temps très long. Nous devons y aller patiemment et éviter toute précipitation. En fait, il y aura nécessairement des gens qui, intérieurement, ne voudront jamais accepter le marxisme-léninisme et le communisme. Nous ne devons pas trop exiger d’eux ; tant qu’ils se soumettent aux exigences de l’État et poursuivent des activités honnêtes, nous devons leur donner la possibilité de se livrer à un travail approprié.
Ces derniers temps, on a constaté un fléchissement dans le travail idéologique et politique parmi les étudiants et les intellectuels, et certaines déviations sont apparues. Il en est qui pensent apparemment qu’ils n’ont pas besoin de se soucier de la politique, de l’avenir de
leur pays et des idéaux de l’humanité. À leurs yeux, le marxisme aurait été à la mode un certain temps et ne le serait plus tellement maintenant. Étant donné cette * situation, il est à présent nécessaire de renforcer notre travail idéologique et politique. Étudiants et intellectuels doivent s’appliquer à l’étude. Tout en travaillant à leur spécialité, ils doivent faire des progrès sur le plan idéologique et sur le plan politique, et pour cela étudier le marxisme, les questions politiques et les problèmes d’actualité. Sans vue politique juste, on est comme sans âme. La rééducation idéologique était nécessaire et elle a donné des résultats positifs. Toutefois, les méthodes employées étaient un peu rudes et ont blessé certains. Cela n’est pas bien. À l’avenir, nous devons éviter ce défaut. Tous les organismes et toutes les organisations doivent assumer la responsabilité du travail idéologique et politique. Cette tâche incombe au Parti communiste, à la Ligue de la Jeunesse, aux organismes gouvernementaux directement intéressés, et à plus forte raison aux directeurs et aux enseignants des établissements scolaires. Notre politique dans le domaine de l’éducation doit permettre à ceux qui la reçoivent de se former sur le plan moral, intellectuel et physique pour devenir des travailleurs cultivés, ayant une conscience socialiste. Il faut mettre en honneur l’idée de construire notre pays avec diligence et économie. Nous devons faire comprendre à toute la jeunesse que notre pays est encore très pauvre, qu’il n’est pas possible de modifier radicalement cette situation en peu de temps, que c’est seulement par leurs efforts unis que la jeunesse et tout le peuple pourront créer, de leurs propres mains, un État prospère et puissant en l’espace de quelques dizaines d’années. Le régime socialiste nous a ouvert la voie vers la société idéale de demain, mais pour que celle-ci devienne une réalité, il nous faut travailler dur. Certains de nos jeunes gens pensent que, la société étant devenue socialiste, tout doit être bien, qu’on peut y jouir d’une vie de bonheur toute faite, sans avoir à fournir d’efforts. Cette façon de voir les choses n’est pas réaliste.
Nos minorités nationales forment une population de plus de trente millions d’habitants. Bien qu’elles ne constituent que les six pour cent de la population totale du pays, elles vivent dans de vastes régions et occupent environ cinquante à soixante pour cent de tout le territoire. C’est pourquoi il est absolument nécessaire que de bons rapports s’établissent entre les Hans et les minorités nationales. La clé du problème est de surmonter le chauvinisme grand-han. Il faut en même temps surmonter le nationalisme local partout où il existe chez les minorités nationales. Le chauvinisme grand-han comme le nationalisme local sont préjudiciables à l’union de toutes les nationalités. Il s’agit là d’une des contradictions au sein du peuple qu’il faut surmonter. Nous avons déjà accompli un certain travail dans ce domaine et, dans la plupart des régions où vivent les minorités nationales, les relations entre nationalités se sont bien améliorées par rapport au passé ; pourtant, un certain nombre de problèmes restent à résoudre. Dans certaines régions, le chauvinisme grand-han et le nationalisme local existent l’un et l’autre à un degré sérieux, et cela appelle notre pleine attention. Grâce aux efforts du peuple des diverses nationalités au cours des dernières années, les réformes démocratiques et les transformations socialistes sont déjà achevées pour l’essentiel dans la plus grande partie de nos régions de minorités nationales. Au Tibet, les réformes démocratiques n’ont pas encore commencé parce que les conditions n’y sont pas mûres. Conformément à l’accord
en dix-sept points conclu entre le Gouvernement populaire central et le Gouvernement local du Tibet, la réforme du régime social y sera réalisée ; cependant, il ne faut pas se montrer impatient, la décision sur le moment où il convient de procéder à cette réforme ne pourra être prise que lorsque la grande majorité des masses tibétaines et des chefs du Tibet le jugeront possible.
Comment les mots d’ordre « Que cent fleurs s’épanouissent », « Que cent écoles rivalisent » et « Coexistence à long terme et contrôle mutuel » ont-ils été formulés ? Ils l’ont été d’après les conditions concrètes de la Chine, sur la base de la reconnaissance des différentes contradictions qui existent toujours dans la société socialiste et en raison du besoin urgent du pays d’accélérer son développement économique et culturel. La poli¬tique : « Que cent fleurs s’épanouissent, que cent écoles rivalisent » vise à stimuler le développement de l’art et le progrès de la science, ainsi que l’épanouissement de la culture socialiste dans notre pays. Dans les arts, formes différentes et styles différents peuvent se développer librement, et dans les sciences, les écoles différentes s’affronter librement. Il serait, à notre avis, préjudiciable au développement de l’art et de la science de recourir aux mesures administratives pour imposer tel style ou telle école et interdire tel autre style ou telle autre école. Le vrai et le faux en art et en science est une question qui doit être résolue par la libre discussion dans les milieux artistiques et scientifiques, par la pratique de l’art et de la science et non par des méthodes simplistes. Pour déterminer ce qui est juste et ce qui est erroné, l’épreuve du temps est souvent nécessaire. Au cours de l’histoire, ce qui est nouveau et juste n’est souvent pas reconnu par la majorité des hommes au moment de son apparition et ne peut se développer que dans la lutte, à travers des vicissitudes. Il arrive souvent qu’au début ce qui est juste et bon ne soit pas reconnu pour une « fleur odorante », mais considéré comme une « herbe vénéneuse ». En leur temps, la théorie de Copernic sur le système solaire et la théorie de l’évolution de Darwin furent considérées comme erronées et elles ne s’imposèrent qu’après une lutte âpre et difficile. L’histoire de notre pays offre aussi nombre d’exemples semblables. Dans la société socialiste, les conditions nécessaires pour assurer la croissance des choses nouvelles sont foncièrement différentes et bien meilleures que dans l’ancienne société. Cependant, il est encore fréquent que les forces naissantes soient refoulées et des opinions raisonnables étouffées. Il arrive aussi qu’on entrave la croissance des choses nouvelles non par volonté délibérée de les étouffer, mais par manque de discernement. C’est pourquoi, pour déterminer ce qui est juste et ce qui est erroné en science et en art, il faut adopter une attitude prudente, encourager la libre discussion et se garder de tirer des conclusions hâtives. Nous estimons que c’est une telle attitude qui permettra d’assurer au mieux le développement de la science et de l’art.
On demandera : étant donné que dans notre pays le marxisme est déjà reconnu comme idéologie directrice par la majorité des gens, peut-on le critiquer ? Bien sûr que oui. Le marxisme est une vérité scientifique, il ne craint pas la critique. Si le marxisme craignait la critique, s’il pouvait être battu en brèche par la critique, il ne serait plus bon à rien. De fait, les idéalistes ne critiquent- ils pas le marxisme tous les jours et de toutes les façons possibles ? Les gens qui s’en tiennent à des points de vue bourgeois et petits-bourgeois sans vouloir en démordre ne critiquent-ils pas le marxisme de toutes les façons possibles ? Les marxistes ne doivent pas craindre la critique, d’où qu’elle vienne. Au contraire, ils doivent s’aguerrir, progresser et gagner de nouvelles positions dans le feu de la critique, dans la tempête de la lutte. Lutter contre les idées erronées, c’est en quelque sorte se faire vacciner ; grâce à l’action du vaccin, l’immunité de l’organisme se trouve renforcée. Les plantes élevées dans une serre ne sauraient être robustes. L’application de la politique « Que cent fleurs s’épanouissent, que cent écoles rivalisent », loin d’affaiblir la position dirigeante du marxisme dans le domaine idéologique, la renforcera au contraire.
Quelle politique devons-nous adopter à l’égard des idées non marxistes ? Quand il s’agit de contre- révolutionnaires avérés et d’éléments qui sapent la cause du socialisme, la question est aisée à résoudre : on les prive tout simplement de la liberté de parole. Mais quand nous avons affaire aux idées erronées existant au sein du peuple, c’est une autre question. Peut-on bannir ces idées et ne leur laisser aucune possibilité de s’exprimer ? Naturellement non. 11 serait non seulement inefficace, mais encore extrêmement nuisible d’adopter des méthodes simplistes pour résoudre les questions idéologiques au sein du peuple, les questions relatives à l’esprit de l’homme. On peut interdire l’expression des idées erronées, mais ces idées n’en seront pas moins là. Et les idées justes, si elles sont cultivées en serre, si elles ne sont pas exposées au vent et à la pluie, si elles ne se sont pas immunisées, ne pourront triompher des idées erronées lorsqu’elles les affronteront. Aussi est-ce seulement par la méthode de la discussion, de la critique et de l’argumentation qu’on peut véritablement développer les idées
justes, éliminer les idées erronées et résoudre les problèmes.
Pris au pied de la lettre, les deux mots d’ordre « Que cent fleurs s’épanouissent » et « Que cent écoles rivalisent » n’ont pas un caractère de classe : ils peuvent être utilisés par le prolétariat aussi bien que par la bourgeoisie et d’autres gens. Chaque classe, chaque couche sociale et chaque groupe social a sa notion propre des fleurs odorantes et des herbes vénéneuses. Mais alors, du point de vue des larges masses populaires, quels doivent être aujourd’hui les critères nous permettant de distinguer les fleurs odorantes et les herbes vénéneuses ? Comment déterminer, dans le cadre de la vie politique de notre peuple, si nos paroles et nos actes sont justes ou erronés ? Nous estimons que, d’après les principes de notre Constitution et conformément à la volonté de l’immense majorité de notre peuple et aux positions politiques communes proclamées à diverses occasions par nos partis politiques, il est possible de formuler, dans leurs traits généraux, les critères que voici :
Est juste :
1. ce qui favorise l’union du peuple de toutes les nationalités de notre pays et non ce qui provoque la division en son sein ;
2. ce qui favorise la transformation et l’édification socialistes et non ce qui nuit à cette transformation et à cette édification ;
3. ce qui favorise le renforcement de la dictature démocratique populaire et non ce qui sape ou affaiblit cette dictature ;
4. ce qui favorise le renforcement du centralisme démocratique et non ce qui le sape ou l’affaiblit ;
5. ce qui favorise le renforcement de la direction exercée par le Parti communiste et non ce qui rejette ou affaiblit cette direction ;
6. ce qui favorise la solidarité internationale socialiste et la solidarité internationale de tous les peuples pacifiques et non ce qui porte préjudice à ces deux formes de solidarité.